Quand les efforts partent en fumée : tabac et Sport
Postée le 29-11-2021 / 545 Vues

Non seulement la cigarette coupe le souffle, mais elle rend aussi l’activité physique dangereuse. Entraînement et performance ont tout à gagner au sevrage tabagique.

Non, le sport ne nettoie pas les poumons et l’activité physique au grand air ne compense pas les effets du tabagisme. Fumer pendant, avant ou après l’effort est même dangereux. Beaucoup de sportifs ne le savent pas et beaucoup de médecins ne le clament pas suffisamment.

«Trop peu de cardiologues s’intéressent activement aux fumeurs. C’est aussi le cas en pneumologie, en oncologie ou en diabétologie, spécialités pourtant concernées au premier chef par le tabac», déplore le Pr Daniel Thomas, cardiologue et porte-parole de la Société francophone de tabacologie (Paris). Le Club des cardiologues du sport, dans ses 10 règles d’or, place en numéro 7 cette mise en garde: «Je ne fume pas, en tout cas jamais dans les 2 heures qui précèdent ou qui suivent la pratique d’une activité sportive».

Le monoxyde de carbone remplace l’oxygène

Pour le Pr Thomas, il faudrait la mettre à la première place. Et pour cause: non seulement le sportif fumeur est exposé aux mêmes risques que tous les autres fumeurs (cancers, maladies cardio-vasculaires, insuffisances respiratoires…), mais il y ajoute des complications liées à sa pratique sportive en perturbant l’apport en oxygène aux muscles, cœur et poumons. L’explication se trouve dans les quelque 4000 substances nocives qui composent la fumée de cigarette, à commencer par le monoxyde de carbone (CO). Issu de la combustion du tabac, ce dernier se lie 200 fois plus à l’hémoglobine que l’oxygène (O) dont il prend la place dans le sang. Il se fixe aussi sur la myoglobine, protéine de la contraction musculaire.

Les muscles et le cœur subissent une asphyxie proportionnelle à ce déficit en oxygène. Le CO détourne ainsi le métabolisme énergétique aérobie (dont le carburant est l’oxygène) vers la filière anaérobie, qui produit de l’acide lactique. Ce dernier est rapidement incompatible avec l’effort quand l’essoufflement ne permet plus de parler(seuil ventilatoire). Les activités d’endurance basées sur la consommation d’oxygène (VO2 max) sont les plus affectées. Le manque d’oxygène disponible impose au cœur d’augmenter sa fréquence pour assurer le même apport sanguin. Mais cette augmentation devient inefficace quand le cœur n’a plus le temps de se remplir, ce qui freine encore plus l’activité. «Les jeunes sportifs limités à l’effort par leur tabagisme ne le ressentent pas forcément. Ils ne prennent la mesure de ce handicap qu’une fois sevrés, lorsqu’ils voient leurs performances augmenter», note Daniel Thomas.

La nicotine augmente la pression artérielle

Autre ennemi: la nicotine, qui stimule des récepteurs cardiaques et artériels spécifiques (comme le fait l’adrénaline). «Chaque cigarette provoque une diminution du calibre des artères, une accélération de la fréquence cardiaque et une augmentation de la pression artérielle», explique le Pr Thomas. Cet effet s’ajoute aux influences adrénergiques naturelles de l’effort (accroissement du débit cardiaque et de la pression artérielle), ce qui abaisse les résultats sportifs.

On s’essouffle tôt, on capitule plus vite, parfois à la limite du malaise. Le risque est l’infarctus du myocarde par spasme artériel sur des rétrécissements des artères du cœur (coronaropathie). Ceux-ci sont plus fréquents chez les plus de 50 ans, et dus à l’athérome par excès de cholestérol et inflammation liée aux particules fines de la fumée de tabac. Même chez les plus jeunes, le risque n’est pas nul: «Il n’est pas rare de voir chez les fumeurs, même sportifs, des infarctus avec des artères coronaires sans déformation visible à l’examen coronarographique», alerte le cardiologue.

La fumée de tabac contient également de très nombreux radicaux libres qui agressent les parois artérielles. Ce stress oxydant favorise l’athérome. La surface artérielle devient «rugueuse», peut se fissurer et provoquer l’agrégation des plaquettes sanguines en caillot (thrombose), source d’infarctus. Cette cascade d’événements peut se produire à tout moment, particulièrement en cas de déshydratation, fréquente lors de la pratique sportive. Le risque cardiaque monte alors en flèche lors d’une énième cigarette «anodine», telle celle qu’on fume après un match de foot avec les copains.

Connaître son taux d’intoxication

Un autre danger moins connu peut être dû au tabac : celui d’une insulino-résistance de toutes les cellules, y compris musculaires. «Cette situation de pré-diabète augmente le risque de diabète ultérieur de 30 %», prévient Daniel Thomas. Or, le diabète est l’ennemi juré des artères.

Plus on fume (tabac, cannabis), plus il y a de CO fixé sur l’hémoglobine. On le mesure indirectement dans l’air expiré, d’où il est éliminé en moins de 24 heures si l’on ne fume pas. Cette analyse est facile mais le matériel coûtant entre 200 et 300 € demeure l’outil des seuls tabacologues. Lire plus sur sante.lefigaro.fr

Source : Sante.lefigaro.fr
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